L’œil de celui qui regarde
Y a-t-il de la beauté dans ces ruelles ?
Ces zones pleines de poussière et de détritus ?
Des orties à moitié drapées sur des tas de déchets.
Des mégots et des préservatifs jetés.
Dans ces ruelles boueuses et ces chemins aux murs de briques,
Adossés à des cieux impitoyables gris ardoise ?
L’EMPRISE DE L’HIVER
Y a-t-il de la beauté dans ces paquets croustillants ?
Dans les croûtes de vers et la merde de chien ?
Y a-t-il de la joie dans ces pissenlits, à moitié périmés ?
Leurs graines soufflées par le vent humide des pots d’échappement.
Les brumes des mégots de cigarette qui s’élèvent,
Ces mauvaises herbes qui chancellent dans ces coins humides ?
Les cages d’escalier miteuses où les enfants jouaient ?
JOIE
La joie des voix d’enfants
Y a-t-il de l’espoir dans ces paysages ?
Où la pauvreté douloureuse fait grincer les os ?
Des toiles d’araignée perlées de gouttes de rosée.
Des traces de pneus dans les ruelles détrempées.
Des portes de garage couvertes de graffitis, suspendues ouvertes.
L’espoir des maisons en terrasse et les vitres brisées.
DRUDGERIE , LA GROS BESOIGNE
Y a-t-il une chance dans ces seringues vides ?
Une douleur aiguisée et sale
Y a-t-il des messages laissés dans les bombes aérosol ?
Ou dans les sacs à moitié remplis de colle ?
Y avait-il de l’amour dans ces préservatifs ?
Le flux et le reflux rapides contre le mur.
Y avait-il de la beauté dans ces respirations
Tirée d’un joint deja roulé
TIRÉE
Cette bravade aux yeux sombres
Le haussement d’épaule de niquer et en s’en fou
Ce visage honteux, ce sourire de chien battu et de chien écrasé
Se faufilant dans ces ruelles
La brume matinale de novembre, obsédante
Y a-t-il donc de la beauté dans ces coins poussiéreux ?
Oubliés ou abandonnés dans les malheurs de la vie quotidienne ?
Et d’espoir, d’amour ou de beauté ?
Avons-nous besoin de ces chemins de campagne ?
Leur boîte de chocolat, et leur beauté statique
Les majestueux et inspirants Downs ouverts
LES DOWNS LE NORD, LE SUD
Je passerai ma vie dans ces ruelles.
Elles ne mènent nulle part, mais donnent accès.
Négligées et sous-utilisées.
Leur utilité quotidienne, plutôt banale.
Leur beauté vous brûle les yeux.
Des coquilles brûlées dans des ruelles brûlées.
RELEVEZ VOTRE ESPIRIT
Alors, y a-t-il de la beauté dans ces ruelles ?
Pas de champs de maïs ou de cieux de corbeaux.
Pas d’acres récoltés ou de coteaux fraîchement labourés.
Pas de pignons ou de salles sacrées.
Pas de collines ondulantes ou de chemins de campagne.
Pas de miel à l’heure du thé, pas d’horloge à trois heures moins dix.
A qui étaient ces lilas, à Eliot ou à Brooke ?
Abandonnés là, dans ces terrains vagues.
Seulement bons pour les papillons ?
COMPOSITION
Le chariot de supermarché, qui rouille lentement
N’est qu’un touriste de l’autre monde
Comme une hirondelle migratrice exotique
Ici aujourd’hui, puis plus du tout
Maison des ronces et du lierre,
Maison des scarabées et des puces
Seuls les écoliers marchent sur ces chemins,
Seulement les chercheurs ou les malades,
Les feuilles mortes et les mouchetures des chemins de traverse.
Par un chemin cassé et pierreux.
DÉCOMPOSITION
Il y a de la vie dans ces feuilles mortes
Tout comme l’espoir et la joie
Tout comme la beauté est là, brillante
Sur les coquilles des morts et dans les os des vivants.
Jeté et oublié, ne dis rien à maman.
Des ailes brillantes ou des feuilles mouchetées,
Le sac en papier danse dans le vent
Bien sûr, nous enterrons les morts ou brûlons le passé.
Sa douleur est trop fraîche pour nous retenir
Sa folie est pleine de nouvelles erreurs
Ses désirs vides et ses poings qui tremblent
LA MORT PAR L’ATTENTE
Assieds-toi donc près du feu et regarde
Sa main tremble, mouchetée par l’âge
Flétrie et rétrécie, comme une vieille relique.
Lancée d’un chantier qui ne vit plus.
Ses os et ses poutres sont usés et ouverts.
Nous pouvons voir la structure du bois.
Le grain, gravé, érodé
Même flétri, à moitié détruit.
Considérez Phlebas maintenant,
Regardez sa lassitude
Pas encore noyé ni mort
Ces ressources seront recyclées.
Dans les ruelles de son imagination
Atome à Atome, poussière à poussière.
L’INÉLUCTABILITÉ DE LA MORT
La mort nous arrache, mais nos coquilles
Gisent dans les ruelles, chez les autres
Comme un matelas humide, mis au rebut.
Ou des chiffons vissés et jetés dans la haie.
La haie qui délimite
Ces autoroutes étirées
Des ruelles qui mènent partout
À MOITIÉ LUES À MOITIÉ COMPRISES
Ceux qu’on lit à moitié, qu’on comprend à moitié
A moitié étudiés, bientôt oubliés
Des aperçus du soleil à travers les nuages,
Occupé comme un scarabée, ou sage comme un ver.
Déchirées, à moitié connues, à moitié apprises par cœur.
Récité souvent en mots chuchotés
Marmonné au mur et ensuite
Premier à sortir de la porte quand la cloche sonne
Souvenirs mais pas compris
Qui avait le meilleur stylo, dont les mots nous faisaient froncer les sourcils, rire ou soupirer,
Comparant le bleu au vert, ou la merde ou la merde,
Quelle chanson était la meilleure, ou la pire, ou pas du tout ?
Quand tout le monde a un mot à dire.
BEAUTÉ PANACHÉ
La beauté rôde dans ces ruelles sans issue,
Chuchotant dans les cordes à linge
Flottant comme un fantôme, espérant, gémissant, maudissant,
Tenant le passé comme une tête coupée
Sous les feuilles froissées, la vie bruisse.
Sous un ciel couvert et des yeux sombres
Frapper ces feuilles mortes dans la joie de l’enfance.
Comme Petronius, parti rejoindre la majorité
Bousculant le chemin de la connaissance
Cachant sa vérité, une telle vanité.
LE MOIS LE PLUS CRUEL
Frappe à la porte et laisse-moi entrer
Je ne peux plus supporter ce fardeau
Son poids lourd et brûlant
S’abat sur moi
Le crapaud du travail
Alors que je rejoins les deuxièmes pauvres
N’étant pas assez bon pour rejoindre le premier
Ni sage ou patient pour être riche.
Ni avide, j’ai tout donné
Et j’ai donné et donné et donné
Sans jamais penser à en prendre un peu
Hanté par l’équilibre, l’inclinaison
Les moulins à vent ont tourné et se sont écartés
Comme Walter Mitty, je réside
Au pays des fantasmes, ou des pelotons d’exécution
La Seigneurie, s’il vous plaît, ne retenez pas
Les récompenses et les prix, s’il vous plaît.
Pour une vie de fées et de peluches !
Donnez-les-moi, s’il vous plaît.
Je mentirai sur mon CV
Et être promu alors !
Je prétendrai être intelligent.
Ou un diplôme d’une université de la vie.
La maison d’Archer était autrefois celle de Brook.
Quel stylo était le meilleur, c’est là que le bât blesse.
Lève-toi et prend les choses de la vie
Lève-toi de ces flaques d’eau.
Allongées dans les allées vides à moitié abandonnées
Comme un monstre du marais primitif
Traînant vers l’avant, dérapant, glissant.
Se précipiter, se noyer, mourir, creuser et se droguer,
Ces lilas pleins de parfum ne durent pas si longtemps.
Puis brunissent et s’humidifient, et se transforment en graines.
Écrit par un fantôme et signé par d’autres
Je revendique le prix pour moi-même
LE VIVANT-MORT
Aussi froid que la pierre
Aussi froid qu’une pierre
Qui explose lentement
Dans l’ombre des pierres
Nous gisons, les vivants mourants.
Dans l’ombre des pierres
Démontrant la cruauté d’Avril
Par l’enterrement des morts
Dans ces ruelles oubliées depuis longtemps
Qui mènent à on ne sait quand
Regardant le passé à travers la lentille
De la nostalgie et se demandant
Pourquoi les choses ne sont plus ce qu’elles étaient
Tiré du chronophage du net
Des tâches qui doivent être accomplies
Ecrites, gravées sur le papier
Martelées dans la pierre
Les Beatles ont menti
L’amour pris et fait ne s’équilibrent pas
Je me tiens ici dans le champ
Comme un bécasseau fou
Prenant des photos d’oiseaux rares
Dont personne ne se soucie
Comme si j’essayais de posséder l’introuvable
Capturer des aperçus sur le papier
Prestige ou pathos
Sur le mur
“J’ÉTAIS ICI”
Comme de la pisse de chien
Lavé par la pluie sans fin sans fin
Marquant un territoire perdu depuis longtemps
Abandonné, puis sorti de l’histoire
Raillé et désavoué.
L’argent est la seule chose
Qui ne doit pas être possédée
Transmis, oui, ou donné, ou emprunté,
Comme une mauvaise nouvelle un jour d’hiver.
TROIS VINGT ANS ET DIX ANS
Entrez numéro 9, votre temps est écoulé
L’OBSERVATEUR DE LA BEAUTÉ
Y a-t-il de la beauté dans ces tas de déchets
Dans les terrils du Nord
Dans les tours de refroidissement, mordues par le gel ?
Les lignes de chemin de fer et les usines ?
Le grand OZYMANDIAS d’autrefois
Regarde mes œuvres et désespère
LA REVENDICATION DE LA NATURE
Y a-t-il de la beauté dans les lacets de chaussures ?
Ou des poubelles vides, ou des bouts de ficelle
Ou bien les crumpets au coin du feu
Brûlant rouge et profond de péché
Ce chien aux yeux noirs
Qui me serre le cœur
Écrivant des poèmes
Que personne ne lit
Ni ne s’en soucie
Obsédé par moi-même
Oublié et interdit
Y a-t-il de la beauté dans les plumes, ou dans la fourrure
Dans les rêveries au nez mouillé ?
Dans l’évasion de la réalité dans nos têtes ?
Est-ce si mal alors de marcher sur les sentiers de Mitty ?
A la recherche d’une grandeur qu’on ne trouve jamais.
Dans le court pont pour les vivants
Ces ruelles aigrelettes.
Sont-elles les mêmes ruelles ?
Ah, nous ne sommes que des épis de maïs soufflés par le vent,
Courbés et déformés, récoltés et semés.
Le sang riche de la vie, gaspillé sur ce qui aurait pu être.
Il y a plus qu’à coller
Tack, tack, tack.
Après, on mangent.